Graffitis découverts sur le site de Pompéi – Photo : Site archéologique de Pompéi
Les hommes et le graffiti
L’histoire des graffiti est intimement liée à celle de l’homme. Quelques soient les origines exactes, que certains situent à la Grèce antique ou à la Rome Antique, tandis que d’autres remontent à l’homme de Cro-Magnon, le graffiti est un fait de l’homme.
l’art pariétal, origine du graffiti?
En effet, le principe même du graffiti est une trace laissée par l’homme pour que les hommes la voient. A ce titre, les nombreuses peintures rupestres retrouvées dans les grottes ou sur les lieux historiques de présence de l’homme peuvent s’apparenter à des graffitis. En effet, ils ont tous les aspects du graffiti : réalisés par des artistes qui savaient parfaitement analyser l’environnement des roches pour les utiliser au plus juste dans leurs créations, les artistes peignaient pour eux, pour leurs proches et la communauté, mais aussi pour les autres qui passeraient dans leur grotte une fois délaissée.
Graffitis découverts sur le site de Pompéi – Photo : Site archéologique de Pompéi
Pour nous qui observons ces fresques historiques plusieurs dizaines de milliers d’années après leurs réalisations, ce sont de formidables témoins de l’époque. La qualité de représentation nous donne de précieux renseignements sur le quotidien de nos ancêtres, et nous permet aussi de mieux appréhender les artistes et leur façon de travailler. Nous savons à peu près maintenant comment les artistes organisaient leurs peintures, de la préparation de pigment minéraux ou issus de la flore alentours aux nombreuses techniques utilisées.
Au-delà de la réalisation pure du travail, les artistes étaient également aidés pour acheminer les pigments, le matériel et le feu, nécessaire à éclairer des pans entiers de parois souterraines.
La Grèce et la Rome antique, scènes historiques du graffiti?
Dans une époque moins reculée, les Grecs anciens et les Romains avaient une culture et une pratique forte du graffiti.
Tout était bon pour laisser une trace sur un mur visible aux yeux de tous : ainsi, les graffitis fleurissaient les murs de Rome ou de Pompéi, tous vantant les mérites et qualités de telle ou telle personne, spectacle ou service.
Graffitis découverts sur le site de Pompéi – Photo : Site archéologique de Pompéi
11,000 graffitis, et ce n’est pas fini
Avec pas moins de 11,000 graffitis mis au jour à Pompéi, la plupart dans un état de conservation remarquable, c’est toute l’histoire de la ville qui se lit sur les murs. On découvre les vertus de tel politicien lors de préparation à des élections, les dates des spectacles de gladiateurs, des déclarations d’amour, de vengeance, ou de gloire à certains services de prostitution qui ont visiblement marqué les clients.
La découverte de tous ces graffitis a laissé d’abord perplexe les historiens. Ce ne sont pas en effet juste quelques mots griffonnés ici ou là, mais une multitude de messages écrits sur la plupart des murs qui montrent aujourd’hui l’effervescence de la ville. Pompéi, parce qu’ensevelie sous la couche protectrice qui l’a détruite, offre un témoignage unique, 21 siècles après, de la vie urbaine de l’époque.
Un graffiti visible sur le mur d’une basilique illustre bien cette surenchère de messages : “Ô murs, vous avez supporté tant de graffitis fastidieux que je m’étonne que vous ne soyez pas déjà tombés en ruine”.
“Gaius était là”
C’est ce côté simple, humain, direct, laissé par l’homme pour les autres qui rend le graffiti intéressant. S’il nous renseigne sur le passé, il est aussi formidablement contemporain. D’ailleurs, l’un des plus vieux graffiti, daté par les historiens au 3 octobre 78 avant Jésus Christ, est éloquent : « Gaius Pumidius Diphilus était là ».
– 78 avant JC et 1942 après JC: “l’homme était là”
Ce graffiti résume à lui seul l’essence de cette trace laissée par l’homme pour l’homme. Qui n’a pas croisé au détour d’une rue, d’un arbre, d’un panneau un « untel ou untelle était là » ? Ce fut le cas de « Foo was here », un graffiti connu des soldats australien de la 1ere guerre mondiale, et « Kilroy was there » qui fait référence aux GI’s durant la seconde guerre mondiale.
2021 “l’homme est toujours là” et l’affiche
De nos jours, il n’est pas rare de croiser dans certaines villes du monde des « BNE was here » ou d’autres graffitis similaires, dans la droite ligne de leurs prédécesseurs. Ils sont donc partie intégrante de l’histoire de l’homme, de ses messages et de ses témoignages d’un instant présent.
[De gauche à droite] Kilroy was here – graffiti de James Kilroy en 1946, Auto-collant BNE was Here de l’artiste BNE sur une borne électrique en Thaïlande – Crédit : Leo Laksi
Le graffiti est le propre de l’homme
Cette façon historique de laisser un message simple, spontané, intuitif, est toujours très vive dans notre société actuelle. Les graffeurs d’aujourd’hui peignent rapidement, le plus souvent avec une voire deux couleurs, comme auparavant.
L’enjeu pour les graffeurs est d’apposer le maximum de graffiti sur le maximum de surface durant le minimum de temps. Et pour cause ; le graffiti est aujourd’hui considéré comme vandale dans la plupart des pays, et est parfois fortement sanctionné.
En conséquence, les graffeurs n’ont que peu de temps pour exercer leur art lors de leurs sorties urbaines.
Les graffitis contemporains
En parallèle, l’avènement des sprays dans les années 60 a permis de multiplier les couleurs et apporter une dimension artistique nouvelle. Les formes des lettres ont également évolué pour atteindre des niveaux impressionnants de détails. Les graffiti sont lumineux, colorés, aux formes complexes. Ils sont animes (Giff-itti de Insa) ou en 3D, surprenants d’illusions optique.
Le graffiti questionne toujours autant apres des millénaires d’existence
Le graffiti divise : si certains sont hermétiques à cet art et ne le considère pas comme tel, d’autres au contraire observent ces graffitis comme des témoignages de vie.
Chacun est libre d’apprécier ou non les graffitis. Quoiqu’il en soit, ils sont depuis toujours un fait de l’homme, et ne peuvent être dissociés de son histoire.